Cependant, une nouvelle catégorie de circuits intégrés à boîtier plastique promet des économies substantielles de coût et de place pour les missions en orbite basse.
La plupart des gens connaissent les grands jalons des débuts de la conquête spatiale : la mise en orbite de Spoutnik en 1957, les vols de Youri Gagarine et d’Alan Shepard en 1961 ou encore l’alunissage de Neil Armstrong en 1969. En revanche, vous ignorez peut-être que les tout premiers objets créés de main d’homme à avoir atteint l’espace (délimité par la ligne de Kármán, à 100 km de la surface de la Terre) sont les V2 lancés par l’Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale, il y a 75 ans environ. Premiers missiles à effectuer un vol suborbital (de quelques minutes seulement), ils étaient guidés à l’aide de calculateurs analogiques.
En 1957, lorsque le satellite Spoutnik fut mis en orbite autour de la terre, où il resta près de 4 mois à une altitude de 250 km environ, le nombre de composants électroniques avait considérablement augmenté, tout comme la durée de la mission. L’année suivante (en 1958), les missions Explorer 1, 3 et 4 emmenaient des détecteurs de rayonnements encore plus loin, permettant ainsi la découverte des ceintures de Van Allen – des zones autour de la terre dans lesquelles des particules chargées à haute énergie se trouvent piégées. Les premières recherches sur le rayonnement cosmique se consacraient largement à protéger de ses effets les astronautes (et cosmonautes) intrépides qui s’aventuraient au-delà de cette nouvelle frontière.
En juillet 1962, on lança le satellite Telstar 1, qui transmit pour la première fois des images télévisées et des appels téléphoniques à travers l’espace. Sans cet engin pionnier, où en seraient les progrès technologiques aujourd’hui ? Pourtant, quatre mois plus tard, il tombait en panne. On finit par en établir la cause : une défaillance des transistors embarqués, provoquée par la dose totale de rayonnement émise lors de l’essai d’une arme nucléaire à haute altitude, un jour avant le lancement de Telstar. L’équipe d’ingénieurs parvint à rétablir le contact en janvier 1963, avant de le perdre définitivement au bout d’un mois. Telstar fut ainsi la première « victime » d’une défaillance électronique due aux radiations. Six autres satellites furent irrémédiablement endommagés au cours des sept mois suivants, faisant de l’étude approfondie des effets des rayonnements sur les systèmes électroniques une priorité absolue pour les ingénieurs et les scientifiques du monde entier.
Pendant plus de 40 ans, les conséquences des défaillances électroniques des engins spatiaux se révélèrent catastrophiques. Il va sans dire que, dans le cas de missions habitées, une priorité absolue fut toujours accordée à la sécurité, afin de protéger leurs inestimables passagers. Mais les coûts de construction de satellites sans équipage pouvaient déjà atteindre plusieurs centaines de millions de dollars – et dépassaient parfois le milliard dans le cas de programmes gouvernementaux de pointe. Au fil du temps, ces engins prirent une place essentielle dans tous les aspects de notre quotidien : émissions de télévision, prévisions météorologiques, navigation, et aussi, bien sûr, usages militaires. Pourtant, leur lancement était si coûteux que seuls quelques pays pouvaient se le permettre.
Au vu des conséquences astronomiques (c’est le cas de le dire) de la moindre défaillance, les agences spatiales et les constructeurs d’astronefs mirent en place des exigences et des normes afin de garantir la robustesse des composants électroniques. Les ingénieurs les appellent parfois des pièces « triple E », abréviation de « électriques, électroniques et électromécaniques ». La plupart du temps, pour appliquer ces spécifications, les constructeurs ont établi des dessins de contrôle d’approvisionnement (Source Control Drawings, SCD), essentiellement destinés à fixer les exigences d’essai des circuits intégrés afin vérifier leur tolérance aux rayonnements, leur durée de vie opérationnelle, leurs performances thermiques et leur résistance mécanique aux forces subies lors du lancement.
Ces SCD étaient souvent pensés pour des missions de 15 ans en orbite géosynchrone à environ 36 000 km audessus de la surface terrestre. Rien à voir avec les vols des premiers missiles, qui dépassaient à peine 100 km d’altitude et ne duraient que quelques minutes !
En 1995, le gouvernement des États-Unis (en l’occurrence, le Département de la Défense) publiait la norme MIL-PRF-38535, établissant ainsi des critères cohérents de qualification, d’essai et de fiabilité pour les circuits intégrés destinés à une utilisation militaire ou spatiale. Cette norme définit les exigences que les fabricants doivent respecter pour être inscrits sur une liste de fabricants qualifiés (Qualified Manufacturer List, QML), et spécifie les différentes classes de circuits intégrés. Les classes M, N et Q concernent les applications terrestres ; la classe V correspond aux applications spatiales, qui requièrent un boîtier scellé hermétiquement. Ces derniers composants sont généralement soumis à des essais de tolérance aux rayonnements pendant la phase de développement, et non en production.
La norme MIL-PRF-38535 définit également un niveau de qualité supplémentaire, l’assurance de durcissement contre les rayonnements (Radiation Hardness Assurance, RHA), qui nécessite d’inspecter chaque lot de production pour vérifier qu’il respecte le niveau de tolérance spécifié (nous reviendrons sur ces performances). Les circuits intégrés résistants aux rayonnements et conformes aux exigences de classe V sont souvent appelés composants QMLV ; ceux qui remplissent les critères de spécification RHA sont appelés composants QMLV-RHA, ou simplement RHA. En 2012, la norme MIL-PRF-38535 a été révisée afin d’intégrer une classe Y, qui couvre les boîtiers de circuit à grand nombre de broches, de type matrice à pastilles (LGA) ou à colonnes (CGA), non scellés hermétiquement.
Depuis que la désignation QMLV a été introduite, les constructeurs des engins spatiaux critiques ont pris l’habitude d’utiliser des circuits intégrés QMLV ou RHA pour garantir le succès des missions. Le haut niveau de qualité et de fiabilité de ces composants implique un coût plus élevé ; cependant, ce coût se justifie au regard des applications visées, qui nécessitent de limiter les risques au maximum.
Ces dernières années, plusieurs évolutions ont concouru à réduire le coût de l’accès à l’espace. Les organismes scientifiques aussi bien que les organisations commerciales ont démontré que les satellites miniatures (également appelés « smallsats »), plus abordables, peuvent s’avérer aussi intéressants que les engins classiques, de grande taille, déployés pour les missions de longue durée. Ils ont en effet récolté des données précieuses lors de diverses missions scientifiques d’observation de la Terre de courte durée (parfois une semaine seulement) en orbite basse. Il est désormais possible pour les chercheurs, entrepreneurs et étudiants d’en lancer, moyennant un budget relativement faible.
Les opérateurs privés qui s’occupent du lancement de satellites de grande taille proposent à des engins plus petits de faire partie du voyage. La NASA et ses partenaires commerciaux profitent également des missions d’approvisionnement de la station spatiale internationale pour y emmener des satellites miniatures ; ces derniers sont ensuite déployés dans l’espace par les astronautes vivant à bord. Voyez comment différents groupes ont profité de ces facilités d’accès à l’espace :
Dans le cadre d’une initiative pédagogique de la NASA, en décembre 2018, un groupe d’écoliers de Floride a conçu, construit, testé et lancé un nanosatellite, ou CubeSat.
Des entreprises ont mis des satellites miniatures en orbite basse pour offrir à leurs clients des clichés haute résolution et régulièrement mis à jour de la Terre.
Certaines sociétés de télécommunication ont annoncé leur intention de lancer des « constellations » de petits satellites en orbite basse pour fournir différents services, notamment d’accès à Internet.
Sur ces missions d’un genre nouveau, la tolérance aux risques et l’attention prêtée aux coûts varie nettement plus que pour les missions traditionnelles.
Les ingénieurs qui conçoivent des satellites miniatures pour des vols en orbite basse, plus courts, avec des budgets plus serrés, se sont mis à utiliser des circuits intégrés prêts à l’emploi. Ceux-ci ne font l’objet d’aucune sélection particulière de la part des fabricants pour prendre en charge les dangers des vols spatiaux. Logés dans des boîtiers en plastique, ils sont ainsi plus petits que les composants spécialement conçus pour ces applications, hermétiquement scellés dans des boîtiers en céramique. Ils affichent également de meilleures performances électriques. Pour autant, le recours à des composants prêts à l’emploi risque de mettre gravement en péril une mission ; et les sélectionner, les inspecter et les tester afin de limiter ces risques peut finir par coûter bien plus cher.
Pour désigner ces circuits intégrés à boîtier plastique destinés à des applications spatiales, on parle aussi de microcircuits encapsulés dans du plastique (Plastic Encapsulated Microcircuits, PEM). Il peut s’agir de composants prêts à l’emploi, ou bien de circuits spécialement sélectionnés ou testés. On s’est également intéressé aux composants qualifiés pour des applications automobiles, ou AEC-Q100 (abrégé en « Q1 »), soumis à davantage d’essais et de procédures de qualification que les circuits intégrés commerciaux. Pour autant, ces essais sont adaptés à l’environnement terrestre, et non aux conditions extrêmes observées dans l’espace.
Le recours à des circuits intégrés prêts à l’emploi ou de type Q1 implique parfois des compromis sur la conception et la disponibilité opérationnelle du système, lorsqu’on ne contrôle pas suffisamment le pouvoir de pénétration des rayonnements ni les autres facteurs de fiabilité des composants. Dans la mesure où les circuits intégrés doivent remplir les exigences de qualité et de fiabilité nécessaires à des missions plus courtes, en orbite basse, pour un budget inférieur à celui des composants QMLV, un certain nombre de fournisseurs ont introduit un nouveau niveau de qualité, qui se situe à mi-chemin en termes de coût. Ces nouveaux circuits intégrés dédiés aux applications spatiales sont dotés de boîtiers en plastique, mais soumis à davantage d’essais et de procédures de qualification que les composants prêts à l’emploi ou Q1.
Voyons maintenant quels risques on prend à utiliser des circuits intégrés prêts à l’emploi ou Q1 dans l’espace, et comment leur amélioration en termes de qualité et de fiabilité peut garantir le succès de missions courtes en orbite basse réalisées par des satellites miniatures.
L’histoire tragique de Telsat illustre bien la nécessité de tenir compte des effets des rayonnements sur les systèmes électroniques installés à bord d’engins spatiaux. Si vous n’avez pas de doctorat en physique nucléaire, et ne prévoyez pas d’en obtenir un, voici quelques analogies qui vous permettront de comprendre ces effets. Je propose de distinguer deux grandes catégories : les effets de la dose totale de rayonnement et ceux des particules isolées (Single-Event Effects, SEE). Les premiers sont comparables à un coup de soleil : plus un astronef passe de temps dans l’espace et s’éloigne de la Terre, plus la dose totale de rayonnement qu’il reçoit est importante (et donc, le coup de soleil qui en résulte). Pour quantifier ce type d’effets, les ingénieurs utilisent une grandeur appelée dose ionisante totale, mesurée en kilorads (krad).
Les SEE ressemblent plutôt à la foudre : la probabilité qu’ils surviennent est faible, mais plus un engin passe de temps dans l’« orage » de l’espace, plus il est susceptible d’être frappé par une particule fortement énergétique, et d’être ainsi endommagé. La sensibilité d’un composant électronique aux effets des particules isolées est mesurée par une grandeur appelée le transfert linéique d’énergie, qui correspond à l’énergie communiquée par une particule à un milieu, exprimée en MeV∙cm2/mg.
Parmi les effets des particules isolées, le phénomène de latchup (Single Event Latchup, SEL) inquiète particulièrement les ingénieurs. Il implique un courant élevé, capable de détruire rapidement un circuit imprimé. Nous pouvons remercier notre bonne étoile que le champ magnétique terrestre protège nos composants électroniques sur Terre, ainsi que nos organismes délicats, contre les intenses rayonnements qui circulent dans l’espace.
Les circuits intégrés classiquement dédiés aux applications spatiales (QMLV et RHA) sont conçus, qualifiés et testés de manière à respecter toutes les spécifications jusqu’à une dose ionisante totale d’1 mégarad (Mrad). À titre de comparaison, un satellite sans blindage en orbite géosynchrone peut absorber plus de 20 Mrad en une année seulement. Dans la pratique, l’ajout d’un blindage réduit considérablement cette valeur ; mais pour les missions en orbite géosynchrone de longue durée, on recherche généralement des circuits intégrés qui résistent au moins à 100 krad. C’est la valeur approximative qu’absorberait le même satellite sans blindage en orbite basse en un an. Bien que les satellites miniatures en orbite basse ne soient généralement pas dotés d’un blindage lourd, ils sont destinés à des missions plus courtes ; une résistance à des doses ionisantes totales comprises entre 10 et 30 krad est donc souvent suffisante.
Une fois défini le niveau de tolérance aux rayonnements nécessaire, le recours à des circuits imprimés prêts à l’emploi pour des vols spatiaux pose un double problème : comment mesurer la tolérance du composant et ses variations potentielles ? Procéder à des essais peut se révéler long et coûteux, car cela nécessite un équipement spécialisé. Concernant les essais de résistance aux SEE, il n’existe dans tous les États-Unis que deux cyclotrons capables de générer les faisceaux d’ions lourds nécessaires pour tester les composants destinés à des vols spatiaux pour un budget raisonnable.
Parfois, les ingénieurs dénichent des données d’essai de résistance aux rayonnements dans des études académiques ou des tests réalisés par des tiers. Cependant, ces résultats peuvent être moins précis que si le test était réalisé par un fabricant de circuits intégrés. De plus, les chercheurs et les entités tierces n’ont pas accès aux modes de test cachés, et n’ont souvent pas une compréhension fine du fonctionnement du composant, de ses spécifications et des méthodes d’essai.
D’autre part, la tolérance aux rayonnements varie considérablement d’un lot de circuits intégrés à un autre. Ce point a été très souvent démontré. Les processus actuels de fabrication à grande échelle de plaquettes de semiconducteur permettent de contrôler parfaitement les paramètres électriques, mais pas les performances de résistance aux rayonnements.
Par exemple, un lot donné d’amplificateurs LM108 produit par National Semiconductor pour les applications spatiales peut supporter une dose de 100 krad, alors qu’un autre lot identique, fabriqué le mois suivant, ne résistera pas à 30 krad. C’est la raison pour laquelle les essais d’acceptation par lot basés sur la résistance aux rayonnements (RLAT) jouent un rôle fondamental dans la production de circuits imprimés pour les applications spatiales depuis l’époque des SCD. Les circuits intégrés prêts à l’emploi, même conditionnés dans une seule bobine, peuvent provenir de différents lots de plaquettes, voire de différentes usines. Cela entraîne des variations considérables en termes de tolérance aux rayonnements. Si la flexibilité de l’offre profite aux applications commerciales, elle constitue un risque pour les missions spatiales.
Les composants en plastique dédié aux applications spatiales sont soumis au minimum à un essai de résistance aux rayonnements réalisé par le fabricant afin de valider leurs performances et d’éliminer les circuits intégrés inadaptés. Les spécifications de résistance à la dose ionisante totale varient en fonction du fabricant ; mais généralement, on vise une valeur de 30 krad, avec une immunité aux phénomènes de SEL de 40 MeV∙cm2/mg, ce qui correspond au niveau de rayonnement en orbite basse.
Pour sa gamme de produits dédiés aux applications spatiales, Texas Instruments va plus loin en soumettant chaque lot de production à des essais d’acceptation par lot pour une dose ionisante totale de 20 krad, en plus de l’essai unique de caractérisation à 30 krad. De surcroît, ces produits sont fabriqués dans les mêmes conditions contrôlées : un seul processus de fabrication, un seul site d’assemblage et un seul ensemble de matériaux, ce qui réduit considérablement les sources de variabilité.
Dans l’espace, les systèmes électroniques sont soumis à des températures extrêmes et aux cycles thermiques correspondants, qui exercent des contraintes mécaniques sur les circuits intégrés et leurs boîtiers. En effet, en orbite basse, les satellites effectuent au moins 12 rotations par jour autour de la Terre. L’alternance entre l’intense chaleur de la lumière directe du soleil et le froid glacial de l’obscurité spatiale entraîne des gradients de température de plus de 3 °C (5,5 °F) par minute, même à l’intérieur de l’engin dont la température interne est relativement sous contrôle.
Les composants subissent des températures descendant jusqu’à – 55 °C (– 67 °F) et montant jusqu’à 125 °C (257 °F). De telles conditions thermiques sont susceptibles d’induire un certain nombre de facteurs de défaillances : fissuration du boîtier ou de la puce, rupture des fils de liaison, pénétration d’humidité, délaminage de la puce, formation de filaments en étain ou rupture des joints brasés. Les matériaux bon marché des composants prêts à l’emploi sont sujets à l’ensemble de ces défaillances. En revanche, les circuits intégrés à boîtier plastique dédiés aux applications spatiales sont constitués de matériaux plus fiables, et soumis à des tests spéciaux pour garantir leur robustesse.
En raison des problèmes de fiabilité de la brasure sans plomb (Pb), l’industrie militaire et aérospatiale a été autorisée à continuer d’utiliser un alliage étain-plomb (SnPb). Lorsqu’une bille de brasure sans plomb, typique des circuits intégrés commerciaux, est associée à un alliage de brasure SnPb, l’écart des températures de refusion et le mauvais mélange des deux types de brasures peuvent entraîner la formation de vides. Le joint brasé sera donc trop fragile pour résister aux cycles de température et aux vibrations au niveau de la carte et du système complet. Pour les matrices à bille (BGA) des circuits intégrés à boîtier plastique dédiés aux applications spatiales, on utilise des billes en étain-plomb afin d’éliminer le risque d’incompatibilité.
Sur les circuits intégrés commerciaux, les essais de variation cyclique de la température et les essais accélérés en chaleur humide ne sont typiquement effectués que pendant la phase de développement. À l’inverse, les circuits intégrés à boîtier plastique dédiés aux applications spatiales y sont soumis en continu pendant la production, à titre d’essais d’acceptation par lot. Cette pratique garantit que toute anomalie dans les performances est corrigée avant que le produit arrive chez le client.
Il est possible de sélectionner les éléments constituants le boîtier (la colle époxy de la puce, les composés à mouler, les réseaux de conducteurs et les fils de liaison) de manière à renforcer le composant. Généralement, la formulation de la colle et des composés à mouler appartient au fabricant, mais il existe de nettes différences au sein du secteur. Les fabricants de circuits imprimés à boîtier plastique dédiés aux applications spatiales se doivent de sélectionner les matériaux les plus performants, quel que soit le coût.
Le délaminage est particulièrement courant dans des environnements difficiles. La puce en silicium se sépare du réseau de conducteurs, ce qui peut amoindrir ses performances voire, dans le pire des cas, entraîner une défaillance complète. Les fissures et le délaminage sont également susceptibles de faire varier les performances du réseau de conducteurs d’un circuit intégré.
Pour améliorer la résistance à ce phénomène, l’une des techniques les mieux documentées consiste à accroître la rugosité de surface. Ce procédé, associé à la bonne colle, améliore l’adhérence entre la puce et le réseau de conducteurs. Dans la mesure où il augmente le coût de fabrication de ce dernier, on y a rarement recours pour les circuits intégrés prêts à l’emploi. C’est en revanche une pratique courante dans la production des circuits intégrés à boîtier plastique dédiés aux applications spatiales.
Les fils de liaison sont également une source de défaillance des circuits intégrés au cours des vols spatiaux. Si les fils de cuivre (Cu) ont prouvé leur efficacité sur de nombreuses applications terrestres, et si l’amélioration permanente du procédé a donné lieu à une plus grande uniformisation et réduit le taux de défaillance global sur le terrain (en ppm), les constructeurs d’engins spatiaux et les agences gouvernementales ont toujours des réserves quant à leur utilisation dans des composants pour l’espace.
Ils posent en effet quelques problèmes fondamentaux :
des problèmes d’intégrité de la liaison, les fils de cuivre étant reliés à des pastilles d’aluminium ;
Des problèmes de corrosion liés à l’interaction entre les composés à mouler ou à la pénétration d’eau ;
Des ruptures des fils de liaison dues aux variations du coefficient de dilatation thermique pendant les cycles de température.
Alors que les circuits intégrés prêts à l’emploi sont souvent réalisés en fil de cuivre bon marché, les composants à boîtier plastique dédiés aux applications spatiales sont fabriqués avec du fil d’or, dont l’extrême fiabilité n’est plus à prouver.
La formation d’une barbe en étain (Sn) est un phénomène connu dans l’industrie aérospatiale. On l’observe sur les circuits intégrés dotés de boîtiers à pattes, dont la brasure est réalisée avec un alliage d’étain. Les fabricants de circuits imprimés à boîtier plastique dédiés aux applications spatiales excluent l’étain brut et les composés à forte teneur en étain de la finition de leurs composants. Concernant les composants BGA, la plupart des fabricants de circuits imprimés commerciaux ont remplacé les billes de brasure en plomb par un alliage à forte teneur en étain, conformément aux exigences gouvernementales pour les applications commerciales.
Le dégazement est le processus de libération spontanée de gaz par un matériau. On a démontré que de nombreux composés à mouler utilisés dans la fabrication des boîtiers en plastique des circuits imprimés sont concernés par ce phénomène. S’il ne pose pas de problème particulier sur terre, il peut se révéler préoccupant dans l’espace. En effet, dans le vide, le volume de dégazement peut être plus important que dans les conditions atmosphériques terrestres. De plus, lorsqu’ils sont soumis à un froid extrême, les gaz libérés par les boîtiers de circuits imprimés ou d’autres sources se condensent, réduisant ainsi la qualité d’image des capteurs optiques et générant d’autres défaillances dues à l’humidité.
La NASA a entamé des essais de dégazement de divers matériaux en 1967 et élaboré la spécification ASTM E595 (de l’American Society for Testing and Materials), qui exige que les substances volatiles condensables collectées représentent moins de 0,1 % et que la perte de masse totale soit inférieure à 1 % après un essai en environnement sous vide. Afin d’éliminer les risques liés au dégazement sur les applications spatiales, les boîtiers de circuits intégrés en plastique sont constitués de composés à mouler à faible dégazement, conformes aux exigences de la NASA.
Depuis l’échec de Telstar, on a consacré toujours plus d’effort à garantir la qualité et la fiabilité des dispositifs électroniques dont sont équipés les engins spatiaux. Les récentes évolutions du secteur ont ouvert la voie à des composants électroniques qui se passent de la batterie d’essais et de procédures de qualification complète des composants QMLV classiques. Cependant, ils restent soumis aux exigences de résistance aux rayonnements et de fiabilité électrique, thermique et mécanique applicables aux missions effectuées par ces nouveaux systèmes. Cette nouvelle catégorie de circuits intégrés à boîtier plastique dédiés aux applications spatiales promet des économies substantielles de coût et de place par rapport aux composants traditionnels, adaptés aux vols longue distance, tout en contribuant au succès des missions courtes en orbite basse.
Documents de référence (en anglais) :
LaBel, Kenneth A, Radiation Effects on Electronics 101 : Simple Concepts and New Challenges (Principes de base des effets du rayonnement sur les appareils électroniques : concepts fondamentaux et nouveaux défis), présentation WebEx du programme NASA Electronic Parts and Packaging (NEPP).
Space Applications : Radiation-Induced Effects (Applications spatiales : les effets des rayonnements), guide du tableau du laboratoire national Lawrence-Berkeley.
Article Wikipedia sur Telstar.
TID-depth curves for various orbits around Earth for one-year mission length (Courbes de profondeur de pénétration de la dose ionisante totale pour différentes orbites géocentriques pour une mission d’un an).